9 000 euros en moins sur le ticket de caisse d’une voiture électrique neuve : voilà qui bouscule les vieilles habitudes du marché automobile. Les chiffres sont là, tranchants : la généreuse bonification environnementale, cette fameuse prime d’achat accordée par l’État et relayée par l’industrie, vient chambouler la donne, surtout pour ceux qui lorgnent sur le marché de l’occasion.
Les chiffres du magazine économique Capital, appuyés par une étude du Deutsche Automobil Treuhand (DAT), parlent d’eux-mêmes : plus de la moitié des concessionnaires allemands interrogés en juin affirment devoir solder leurs voitures électriques d’occasion pour espérer les écouler. La raison ? Cet écart de prix, qui se resserre dangereusement entre véhicules neufs et d’occasion, rend la revente de ces derniers de plus en plus compliquée.
Andreas Radics, du cabinet Beryll, ne mâche pas ses mots. Les primes de subvention rognent la valeur résiduelle des modèles électriques d’occasion. Les modèles plus anciens paient le prix fort. Il suffit de regarder la décote d’un véhicule électrique qui a déjà parcouru 80 000 kilomètres et a quatre ou cinq ans d’âge : là où l’on savait prévoir une valeur résiduelle à peu près stable, tout s’effondre à cause du nouveau jeu de primes et du rythme effréné des innovations techniques.
Pour comprendre l’impact concret de ces subventions, il suffit de comparer : l’acheteur d’un véhicule neuf profite d’un rabais immédiat pouvant grimper jusqu’à 9 000 euros. De quoi rendre les modèles d’occasion, privés de toute aide, nettement moins attractifs. Parallèlement, la course à l’innovation, batteries, logiciels embarqués, accélère l’obsolescence des modèles qui ne datent pourtant que de quelques années.
Le marché du leasing n’échappe pas au phénomène. Une situation qui surprend les professionnels : alors que les mensualités de location dépendent de la valeur résiduelle attendue, on observe des taux de leasing anormalement bas pour les voitures électriques neuves. Lukas Steinhilber, de la plateforme Vehiculum, souligne la tendance : la demande flanche, et les prix glissent à la baisse. La logique économique classique vacille.
Si l’on scrute les dernières offres de leasing analysées par Vehiculum, il apparaît qu’elles sont devenues encore plus abordables côté électrique, alors que les véhicules à moteur thermique, eux, voient leurs tarifs stagner. Ce n’est pas un hasard : les constructeurs ont tout intérêt à multiplier les immatriculations électriques pour satisfaire aux exigences européennes sur les émissions de CO2. Martin Weiss, responsable de la valorisation des véhicules chez DAT, l’assure : « Des taux de location attractifs aideront certainement les fabricants à atteindre leurs objectifs ».
Le marché automobile s’ajuste, contraint et forcé, mais il ne repartira pas indemne de ce bouleversement. La dépréciation accélérée des modèles électriques d’occasion, la volatilité des prix et la pression réglementaire dessinent les contours d’un paysage en pleine mutation. Pour les acheteurs, tout l’enjeu sera de naviguer entre ces lignes de force sans perdre de vue la valeur réelle de leur investissement. Qui saura tirer son épingle du jeu dans ce marché où les règles, soudain, ne tiennent plus tout à fait ?














































