Liberté de la presse : quel pays la respecte le mieux ?

0
Journaliste international avec drapeaux pour la liberté de presse

Huit. Voilà le chiffre brut, implacable, qui résume l’état planétaire de la liberté de la presse en 2024. D’après Reporters sans frontières, seuls huit États décrochent la distinction « situation très satisfaisante ». Le droit d’informer, pourtant consacré à l’échelle internationale, reste verrouillé dans plus d’un tiers des pays membres de l’ONU. L’accès à l’information, lui, demeure une promesse non tenue pour des millions de citoyens.

La Finlande, la Norvège et le Danemark s’installent en haut du classement, tandis que des démocraties dites exemplaires voient leur position fléchir. Partout, la censure avance masquée, l’autocensure s’installe, les pressions économiques s’intensifient. Même dans les pays où la liberté de la presse figure dans la Constitution, la réalité échappe trop souvent aux principes affichés.

Liberté de la presse dans le monde : où en sommes-nous aujourd’hui ?

Chaque année, le classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières (RSF) met en évidence le caractère fragile du droit à l’information. Si certains États affichent un score global brillant, la carte mondiale révèle une mosaïque de situations, oscillant entre bastions démocratiques et zones où le journalisme est muselé sans état d’âme.

L’Europe du Nord, fidèle à sa réputation, s’illustre : Finlande, Norvège, Danemark, Suède. Ces pays où la liberté de la presse est respectée cumulent indépendance des rédactions, protections juridiques, et quasi-absence de censure organisée. À l’autre extrémité, la Chine, la Corée du Nord ou l’Érythrée verrouillent l’information, confisquent l’autonomie des journalistes et imposent un contrôle sans faille sur les médias.

Pour mieux comprendre la diversité des contextes, voici quelques grands traits qui marquent le paysage mondial :

  • L’Europe centrale et orientale traverse une période agitée, entre interventions politiques, lois restrictives et agressions contre les journalistes.
  • Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, la liberté de la presse demeure précaire, prise en étau entre conflits permanents et accès limité à l’information, comme à Gaza ou en Arabie Saoudite.
  • Les États-Unis et la France ne sont plus à l’abri des dérives : polarisation, attaques contre la presse, concentration des groupes de médias sont devenues leur lot quotidien.

Le constat ne se résume pas à des moyennes. La situation de la liberté de la presse varie d’un contexte à l’autre, se heurte à la violence, à la pression économique, à des lois qui restreignent le champ d’action, ou à l’absence d’institutions protectrices. Derrière les chiffres et les cartes, RSF éclaire la diversité des obstacles et des avancées, loin d’un tableau monochrome.

Quels critères permettent d’évaluer le respect de la liberté de la presse ?

La méthodologie du classement mondial de la liberté de la presse, signée Reporters sans frontières (RSF), ne se contente pas d’un score unique. Cinq indicateurs principaux s’entrecroisent pour brosser un panorama nuancé de chaque pays.

Voici les grandes lignes qui structurent cette évaluation :

  • Indicateur politique : Il jauge le soutien ou l’hostilité des autorités envers le droit à l’information. Un État qui bride le travail des journalistes ou laisse prospérer les agressions contre la presse voit sa note s’effondrer.
  • Indicateur légal : L’analyse porte sur la solidité du cadre légal, l’indépendance de la justice, la réalité de la liberté d’expression. Les textes qui criminalisent l’activité journalistique ou filtrent l’accès aux données pénalisent lourdement les pays concernés.
  • Indicateur économique : Concentration des médias, dépendance à de puissants groupes, barrières financières à la création de nouveaux titres : autant de facteurs qui minent la diversité de l’information.
  • Indicateur socioculturel : La pression sociale, la stigmatisation, l’autocensure et la place accordée aux minorités ou aux femmes dans les rédactions influencent la liberté de ton et la qualité du journalisme.
  • Indicateur sécurité : Il recense menaces, agressions, assassinats de journalistes. L’insécurité chronique fait plier la presse, parfois jusqu’au silence.

La combinaison de ces critères permet de distinguer les pays où la liberté de la presse s’exerce au quotidien, de ceux où elle reste un vœu pieux.

Zoom sur les pays exemplaires : qui sont les meilleurs élèves et pourquoi ?

Chaque année, une poignée d’États se démarquent clairement dans le classement mondial de Reporters sans frontières. Ici, la liberté de la presse ne relève pas de la théorie, mais d’une pratique ancrée dans les institutions et les mentalités. La Finlande, le Danemark, la Suède, l’Irlande et le Portugal occupent les premières places, grâce à une performance constante sur tous les critères analysés.

En Europe du Nord, l’indépendance éditoriale va de pair avec la stabilité politique et un appareil juridique solide. La pluralité des médias, la protection des sources et l’absence de censure forment un socle inébranlable. Les journalistes peuvent accomplir leur mission sans craindre pour leur sécurité ; les actes de violence à leur encontre restent rares, presque marginaux si l’on regarde à l’échelle du globe.

Pour illustrer les facteurs qui font la différence, voici comment ces pays tirent leur épingle du jeu :

  • En Finlande, la presse jouit d’un haut niveau de confiance. La transparence des institutions et le respect du droit à l’information favorisent un journalisme rigoureux.
  • Au Danemark et en Suède, la diversité des rédactions et des mécanismes de régulation limitent la mainmise de grands groupes sur l’information.
  • L’Irlande et le Portugal se distinguent par la protection poussée des sources et l’absence d’obstacles juridiques majeurs.

Au-delà de ce podium, d’autres exemples méritent d’être cités. L’Estonie, la Suisse, l’Allemagne s’imposent eux aussi comme des références, où le journalisme indépendant peut s’exprimer dans un climat économique et sociétal propice. Dans ces contrées, la liberté de la presse s’affirme comme une valeur cardinale, défendue avec vigilance face aux tentatives de censure ou aux risques de concentration excessive.

Journal ouvert avec carte du monde et lunettes pour journalisme libre

Enjeux actuels et défis à relever pour garantir une information indépendante

La concentration des médias s’impose comme une menace directe pour la pluralité des points de vue. Quelques groupes contrôlent la majorité des titres, étouffant la diversité et plaçant le journalisme indépendant sous pression. Les difficultés économiques, elles, dictent parfois la ligne éditoriale plus sûrement que les convictions des rédacteurs. Avec la baisse des revenus publicitaires et une dépendance accrue aux GAFAM, la presse se bat pour survivre sans perdre son intégrité.

La désinformation circule à une vitesse inédite, brouillant la frontière entre information vérifiée et intox. Les journalistes font face à une défiance croissante, alimentée par la viralité des réseaux sociaux et des campagnes orchestrées, parfois à l’initiative d’États. Le Canada, la France, l’Ukraine, la Russie : chaque pays apporte son lot d’exemples, entre menaces physiques, interférences politiques, restrictions d’aides publiques ou blocages d’accès aux documents.

La montée des violences contre les journalistes ne faiblit pas. RSF recense une multiplication des exactions, en particulier dans les pays rouges de son classement. Le prix payé par les citoyens est lourd : une information appauvrie, filtrée, trop souvent orientée. Face à ces dérives, la vigilance collective, la transparence et la défense d’un espace médiatique ouvert restent la clef pour que le droit à l’information ne soit jamais négociable.

Un monde où la presse respire, c’est un monde où chacun peut voir, savoir, choisir. Reste à savoir si cette respiration s’étendra, ou si elle se fera, demain, plus rare encore.